Rencontre avec Allison Scagliotti


© Freeform
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A 25 ans et près de 14 ans de carrière derrière elle, Allison Scagliotti est une habituée du petit écran américain. Actuellement au casting de la série américaine Stitchers, diffusée sur Freeform, Allison est actrice depuis l'enfance et se bat au quotidien contre les stéréotypes féminins rencontrés dans le show business mais aussi contre les injustices faites aux femmes dans la vie de tous les jours. Passionnée, investie et déterminée, elle est un exemple pour un bon nombre de jeunes filles à travers le monde, comptant pas moins de 102 000 abonnés sur son compte Twitter. Rencontre avec une personnalité hors du commun, amie des femmes.

Women Lab : Comment te présenterais-tu à ceux et celles qui ne te connaissent pas encore ?

Allison : Bonjour, je suis Allison. Je suis de signe astrologique Vierge. Actrice, musicienne, auteur, ancienne mime, collectionneuse de carnet Moleskine et à fond sur le quartz fumé ces temps-ci.

WL : Comment es-tu devenue actrice ? 

Je suis tombée amoureuse du théâtre quand j'ai vu Le Fantôme de l'Opéra au Théâtre Saenger à la Nouvelle-Orléans. J'étais déjà familière au ballet et aux cours de piano, et j'ai eu de la chance parce que mon école avait un fantastique département dramatique. J'étais aussi au bon endroit au bon moment. Chamber Stevens, un coach pour jeunes acteurs, était en tournée dans le pays pour promouvoir son livre et m'a repérée avec mon air maussade habituel dans un magasin de livres Barnes & Noble. Un mois plus tard, on me photographiait pour les agences et 6 mois après j'étais en train de tourner mon premier pilote à New York. La vie est dingue.

WL : Quelle femme rêvais-tu d'être quand tu étais petite ?

Cela peut paraître étrange, mais à la fin des années 80, début des années 90, il y avait cette série d'histoires pour enfants en cassettes audio. Elles étaient intéractives, et pouvaient être personnalisées avec le nom de votre enfant en tant que héros du conte. Ma cassette « Allison » racontait l'histoire d'une fille courageuse qui triomphait des tyrans et sauvait son royaume, terrassant des dragons et utilisant son intellect pour être plus maline que les méchants. Je voulais devenir la Allison "badass" de cette cassette.

WL : Quelle(s) femme(s) t'inspirent au quotidien ?

Il y a honnêtement un grand nombre de femmes qui m'inspirent. Dita Von Teese, pour sa célébration du glamour excentrique et son crédo qui est que la beauté vient de toutes les formes, tailles, couleurs, et n'a pas besoin de venir d'une maison de design de haute gamme. Les auteurs Roxane Gay, Kate Bolick, Lynn Crosbie et Miranda July pour leurs intenses et singulières voix littéraires. Les musiciennes Cherie Currie, Carrie Brownstein, St. Vincent et Kim Gordon pour avoir provoqué des ravages dans l'industrie de la musique à prédominance masculine.

WL : A quel moment de ta vie as-tu compris qu'être une femme n'allait pas être si simple ?

Ma mère me raconte toujours une histoire étrange dont je ne me souviens pas mais qu'il me semble important de mentionner. Depuis que je suis née, je porte le poids du monde sur mes épaules, elle m'a surprise assise sur les marches à l'arrière de notre maison avec mon visage entre mes mains, l'air pensif. Quand elle m'a demandé si tout allait bien, j'ai juste dit : « Ce monde est moche ». J'avais 3 ans. Je n'avais pas encore entendu parlé de Donald Trump.

Mon premier souvenir d'indignation est apparu quand mes parents m'ont emmenée voir le Cirque Barnum & Bailey à la Nouvelle-Orléans. Je devais avoir 6 ans. J'ai tout de suite remarqué que les acrobates masculins portaient des combinaisons qui couvraient tout leur corps, tandis que leurs homologues féminines exécutaient les mêmes figures, parfois même plus compliquées, dans des combinaisons string. J'ai levé mon poing et demandé à ce qu'on parte. Mon père, qui avait acheté les tickets et nous avait tous conduit au Superdome, est resté. Ma mère s'est assise avec moi dans le hall pendant que je plannifiais ma rébellion civile. L'image des femmes exploitées me gênait tellement que j'ai demandé qu'on me donne le numéro de Disney quand une pub osée pour James Bond qui montrait une scène de sexe, a été diffusée sur une chaîne populaire destinée aux enfants au milieu de la journée.

Pour faire court, j'ai toujours été en guerre avec l'inégalité.

WL : Quelle(s) injustice(s) liée(s) aux femmes te révolte(nt) ?

L'un des plus grands problèmes que j'ai est le déséquilibre qu'il y a dans notre sentiment de sécurité. Le fait qu'une fois le soleil couché je ne quitte pas mon appartement sans une bombe lacrymogène et un petit couteau me met en colère. Le fait qu'on attende de moi que je change mon apparence et mon comportement de façon à n'inciter personne à m'agresser est absurde. L'idée que si je dis simplement « non », cela pourrait être le déclencheur pour quelqu'un pour me faire du mal. Voici une idée : au lieu de mettre l'accent sur la façon dont les femmes peuvent éviter de se faire violer, pourquoi ne pas apprendre aux hommes partout dans le monde de ne PAS violer, de ne PAS voir les femmes comme des objets à posséder, à utiliser puis à se débarrasser ?

WL : Que dirais-tu à la jeune fille que tu étais si tu la recroisais ?

Déconnecte-toi de MySpace et pratique plus la guitare.

WL : Qu'est-ce que vous vous dites quand vous voyez votre reflet dans le miroir ?

Mince alors, je suis canon avec un chapeau !

WL : Est-ce dur d'être une femme dans le monde du show business ? As-tu déjà reçu des critiques sexistes qui t'ont marquées ?

J'étais une enfant-actrice, donc j'ai passé mon adolescence à auditionner pour des rôles de personnages en dépression, des rôles qui plaçaient les gens dans des boites. J'étais conditionnée pour penser en stéréotypes. Parfois, j'avais des retours comme quoi je n'étais pas assez sexy, pas assez jolie, pas assez connue ou pas assez vulnérable pour un rôle. Le lycée c'est déjà mauvais, ajoutez à cela le fait d'être rejetée par Hollywood et vous avez la recette de l'insécurité durable. Se construire une peau épaisse sans qu'elle ne devienne calleuse est une tâche difficile que je ne suis pas sûre d'avoir maîtrisée. Se dire à soi-même des paroles positives demande du travail, mais est essentiel.

WL : Tu es aussi dans un groupe de rock, comment en es-tu arrivée là ? Qu'est-ce que ça fait d'être la seule femme dans ce groupe ?

© Jackson Davis
© Jackson Davis

Etre dans un groupe m'a pris une décennie. A l'adolescence, je rêvais de faire un stage au magazine Rolling Stone, je décorais ma chambre pour qu'elle ressemble au hall d'entrée d'une maison de disques, et généralement je me considérais comme une amatrice avertie de rock. De pouvoir finalement apporter une musique originale sur scène et dans un studio est littéralement un rêve devenu réalité. On est tous des acteurs et/ou auteurs, qui essayons de voir jusqu'où on peut emmener ce projet parallèle de devenir des rock stars.

© Jackson Davis
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Quant à cette question très répandue sur le fait d'être une femme dans la musique... Il y a une citation de Brody Dalle qui a toujours résonné en moi : « Ils disent que les femmes ne peuvent pas jouer de la guitare aussi bien que les hommes. Je ne joue pas de la guitare avec mon putain de vagin, donc quelle différence cela fait ? » La bonne nouvelle pour moi c'est que mes camarades du groupe ne me font pas me sentir comme une intruse dans un univers masculin. Nous partagons la créativité et le leadership de façon égale, et cela s'est fait sans effort depuis le premier jour. Je crois que je suis assez chanceuse de dire que je ne sais pas ce qui est différent ou inhabituel à propos du fait d'être la seule femme dans un groupe. Je sais juste ce que c'est que d'être dans un groupe : beaucoup de travail et quelque chose dont chaque seconde en vaut la peine.

WL : Qu'aimerais-tu accomplir dans le futur ?

Réaliser, produire, vendre un scénario que j'ai écrit, enregistrer un album de blues et faire une tournée, passer du temps à Broadway, vivre à Seattle, apprendre à jouer du banjo, visiter l'Islande, épouser Jack White. C'est une petite liste.

WL : Quels conseils donnerais-tu aux jeunes femmes qui veulent réussir dans la vie ?

N'accepte aucune merde. Ecoute tes tripes. Refuse de laisser quiconque faire de toi une victime. Et toujours, toujours faire des choix basés sur ce qui te rend heureuse TOI, pas ce qui fait plaisir à quelqu'un d'autre. Toujours supporter et encourager tes soeurs de toutes les races et de tous les patrimoines. Il y a de la force dans le nombre.

WL : Pour finir, as-tu une citation de femme qui te parle plus qu'une autre ?

Oui, Eleanor Roosevelt : « Personne ne peut vous faire vous sentir inférieur sans votre consentement ».


Propos recueillis par Isabelle Ratane le 7 mars 2016.

  • Retrouvez Allison Scagliotti dans le deuxième saison de Stitchers qui débutera le 22 mars aux Etats-Unis, sur le chaîne Freeform.

Allison est une jeune femme engagée qui soutient le Project Mermaids (photo ci-dessous) créé par les photographes Angelina Venturella et Chiara Salomoni en faveur de la conservation des océans.

© Project Mermaids
© Project Mermaids

Elle a également posé pour le Not Enough Project qui a pour but de dénoncer la vision de la société sur les femmes et qui vise à valoriser l'estime de soi. Retrouvez sa participation au projet ici.

Crédits photos : © Freeform / © Jackson Davis / © Project Mermaids
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